La ballade des étiquettes
« Tu n’as pas de titre ni de grade Mais tu dis « Tu » quand tu parles à Dieu » Ces célèbres paroles sont d’une vérité et d’une profondeur insoupçonnées. Qui ne s’est jamais senti réduit à son titre ou à son grade ou à toute autre étiquette réductrice ? Bien souvent, dans le quotidien, nous n’existons plus qu’en tant que… collègue de, fils de, frère de, prof de, secrétaire de, membre de, diplômé de, voire prisonnier de, coupable de, suspecté de… Un étiquetage de surface et de circonstance qui fige la personne dans ses attributions ou dans ses attributs, dans sa qualité ou son défaut majeur, bien souvent dans ce qu’il n’a pas choisi, mais qui en tout cas n’est pas son moi profond. Si l’on n’y prend garde, ces étiquettes nous condamnent à des relations superficielles et ressemblent à nos cages de HLM, chacun y étant systématiquement casé et numéroté, puis trop souvent doté d’un surnom réducteur : l’arabe, le fou, le sourd, l’homo, le zarbi... Rares sont les étiquettes glorieuses ! Et si l’on si essayait d'inverser la vapeur ? Tordre la barre dans l’autre sens afin de parvenir à voir l’autre en lui-même et non plus selon une apparence, un travers ou un épisode de son passé ? Ainsi s’instaurerait un dialogue des « tu », de « moi » à « toi ». Cela signifie bien sûr accueillir le meilleur de l’autre, même si l’on sait que chacun est ombre et lumière, moi autant que lui. Donc voir, entendre et accueillir en lui-même autrui afin de pourvoir l’aimer pour ce qu’il est au delà du vernis, flatteur ou discriminatoire, des étiquettes. Le modèle de cette relation, je le lis dans la réponse de Montaigne au sujet de ce qu’était le ciment de son amitié avec Etienne de la Boétie : « Parce que c’était lui, parce que c’était moi ». Formule transposable dans le domaine de tous les sentiments, bien entendu. Et valsent les étiquettes…

3 Comments:
D'où vient qu'on peut dire "Tu" à Dieu ? peut-être du fait que on se sait aimé et accueilli par Lui, non pas pour ce que nous faisons, mais simplement pour ce que nous sommes .....
c'est bien l'image alors des relations qu'on pourrait avoir avec autrui. Si Lui ne nous met pas d'étiquette alos qui sommes-nous pour en mettre sur notre prochain ? pour l'enfermer dans un bout de sa vie? pour le réduire à son statut social ? etc....
la rencontre sans étiquette de deux personnes leur laisse toute liberté à se découvrir et à avancer dans cette découverte sans contraintes et elle induit d'autant plus de respect mutuel. elle ouvre des portes qui auraient été sytématiquement et hermétiquement fermées par l'existence d'un étiquette affichée,qu'elle soit flatteuse ou réductrice ou même neutre .
mais alors comment faire pour y parvenir ? peut être en s'intéressant directement au coeur de la personne que l'on a en face et en ouvrant un peu du sien pour laisser passer librement l'échange ....
petit complément :
le pire est quand on s'enferme soi-même et qu'on se sclérose sous une étiquette qu'on a pris l'habitude de porter devant les personnes qui nous connaissent depuis un certain temps.
alors en effet, qu'il peut être salutaire et libérateur que l'autre qu'on rencontre nous permette aussi d'en sortir ! .....
Oui Camisouris
le coeur est indemmne de tout étiquetage et tu as mis le mot (mieux que le doigt) sur le coeur du problème. On se prend pour le Messie si l'on vit dans le "Et vous, que dites-vous que je suis?"
et l'on se retrouve crucifié par le qu'en-dira-t'on avec une belle étiquette en langue de boa au dessus de sa tête en guise d'auréole
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